Once Upon A Time
« i will do it, i will win. »
J’observe le ciel avec une amertume certaine, tout en me levant. Cela va faire trois jours que mon père a omis de réparer le toit, ainsi, trois jours que je passe mes nuits à la belle étoile. Le fait de dormir en ayant la possibilité d’observer la nature n’est pas ce qui me dérange, mais c’est plutôt le fait de pouvoir être vue, qui me déplait énormément. Ce n’est pas le fait d’être épiée au sens propre du terme qui me dérange, mais le fait que les gens puissent me voir dans mon intégrité. Qu’ils puissent voir à quel point je suis faible en réalité : lorsque les gens m’aperçoivent dans la rue, ils voient une battante, une jeune fille de 17 ans qui ramène à manger pour sa famille, qui est dans le besoin. Une jeune fille qui se dévoue à sa famille, mais en réalité, je suis bien plus faible que ce dont j’ai l’air, et c’est lorsque le jour de la parade approche que je m’en rend compte, que la cruelle réalité m’explose en pleine face, sans me laisser le temps de dire « ouf ».
Je m’assieds en tailleur devant l’énorme fente donnant sur la maison de chaume des voisins, et sur l’horizon : un paysage recouvert de forêts, mais aussi et surtout d’eau, avec d’énormes lacs naturels. Je pense à mon père et ma mère, qui lorsque je vais descendre, vont encore me demander si ma décision est définitive. Et elle l’est : je vais participer aux jeux. Je ne supporterais pas de recevoir plus de nourriture, d’avoir des privilèges que n’ont pas mes soeurs, alors que je me défile. C’est dans cette optique que je suis plutôt bien nourrie, et je le sais, alors, je ne veux pas les décevoir. La brume est épaisse ce matin. Lorsque je sors mon corps uniquement vêtu d’un fin tissu de soie de la couverture, je sens la brise glacée venir geler chacun de mes membres et passer dans mon sang. Je me lève donc brusquement et non sans mal, pour sortir un chemisier de mon armoire.
Pendant que j’enfile ce chemisier, je repense aux Jeux qui se dérouleront sous peu, est-ce vraiment une bonne chose de se porter volontaire ? Ai-je vraiment une chance de m’en sortir face aux autres princes de carrière ? Qu’est-ce que les gens du District II vont penser de moi ? Suis-je courageuse, ou simplement inconsciente ? Non. Je n’ai pas le droit de faiblir, et de céder. Je dois être forte si je veux préserver mes soeurs des Jeux, et leur offrir une meilleure vie sous la compensation monétaire de la Bastide. Je me place devant la glace, et m’efforce de sourire. Je m’entraine ainsi à tirer sur mes joues pour paraître heureuse, même si je ne le suis pas. Je suis bien trop perturbée en ce moment, mais il est impensable de laisser ma famille remettre en question mes choix. Lorsque j’ai l’impression que mon sourire parait honnête et sincère, je prends la route des escaliers.
Julia & Marine sont déjà à table pour le petit déjeuner. Elles me lancent un grand sourire que je leur renvoie aussitôt, en murmurant un petit « Bonjour », quelles me rendent dans la seconde qui suit en choeur. Maman est là elle aussi, devant sa poêle à préparer ce qui semble être des oeufs. Je cligne deux fois des yeux pour m’assurer que je ne suis pas en train de rêver : les oeufs sont très rares en cette saison, étant donné que beaucoup de poules meurent. J’affiche un grand sourire, mais un sincère cette fois, et, je ne trouve pas de mots pour lui demander d’où provient ces oeufs, je n’ai pas envie qu’elle y voit une quelconque insolence ou pique vis à vis du fait que cette année a été particulièrement désastreuse au niveau des finances de la famille. Nous coupons les deux oeufs durs en deux, et, nous les partageons entre nous quatre. Papa est déjà parti lui, il prend beaucoup plus tôt que Maman à la boîte de fabrication de fibre optique. Il fait du zèle pour essayer de dégoter un meilleur boulot.
Une fois mon demi oeuf dur avalé, et deux verres d’eau avalés d’une traite, je fais une légère bise à mes soeurs et ma mère, avant de sortir. Ce matin et comme tous les jours de la semaine, je dois aller en cours. Je ne suis pas une fan des cours, notamment à cause du fait que nous sommes mélangés à quelques personnes des départements les plus aisés, et que ces dernières nous regardent souvent avec de la pitié, et de l’arrogance. Je ne veux pas qu’on éprouve de la pitié pour moi. Nous n’avons pas beaucoup d’argent, c’est vrai, mais, j’ai une famille aimante et je suis très heureuse de l’avoir. Quitte à vivre dans ces conditions de vie, je pense sincèrement qu’avec des proches comme les miens, la situation n’est pas si désagréable.
Mon sac sur le dos, je pénètre dans le bâtiment par le portail, et, on me regarde immédiatement. Je ne sais pas réellement pourquoi les gens m’observent, mais c’est chaque fois la même chose. Peut être car, je ne suis jamais très coquette quand je vais au lycée, je ne suis pas très coquette en permanence d’ailleurs, et mes cheveux mêlés le montrent clairement. Surtout aujourd’hui, puisque nous avons le cours d’éducation physique. J’apprécie énormément ce cours, car c’est l’une des matières où je peux rouler de façon prononcée sur les fils à papa de la ville, qui nous méprisent tant.
Très vite, le son de la cloche retentit et abasourdit les gens ayant le malheur de se trouver en dessous. Je lève la tête en direction du bruit, remonte mon sac, et avance. Tout autour de moi, les gens parlent, rient, et ont hâte de voir les Jeux à la télévision. Ils parlent de Neall, le gagnant de l’année dernière. Un roux, qui pour le coup n’a réellement pas d’âme pour trahir ses alliés. M’enfin, je pense qu’il ne voulait qu’une chose : survivre. Notre professeur d’EPS sort du bâtiment sourire aux lèvres, en nous disant que cette fois-ci, en vue des Jeux, un cours de combat au corps à corps est prévu.
Je vais brièvement aux vestiaires et enfile un uniforme moulant ayant la particularité de protéger du froid. Un luxe lorsque l’on sait que le gymnase est mal en point, et que nous allons devoir lutter dehors. J’observe le premier duel. Deux fils à papa. Les règles sont libres, il suffit de faire en sorte que l’opposant se rende. Le premier - un certain Bernard je crois -, charge Thibaut, qui d’un pas de coté esquive le coup et le plaque au sol. Bernard abandonne tout de suite. Je rigole, et, la professeur me demande immédiatement de me battre contre un des colosses de la classe, devant les regards noirs répétés de notre ami Bernard.
Le colosse s’étire et montre ses muscles, pour m’intimider. Je lui réponds avec un simple rictus méprisant. Je connais bien ce gars, et je sais qu’il ne sait pas se battre. Il est le fils d’une famille de fermiers du coin, ils sont pauvres, très pauvres, et leur fils travaille avec eux, ce qui lui vaut cette étonnante musculature. Lorsqu’il me menace en approchant vivement sa tête à la manière d’un serpent souhaitant effrayer sa proie, je ne fais que soupirer, et me préparer à sa charge.
Une charge qui ne tarde pas : il me fonce dessus, l’épaule devant, une charge que je prends droite dans le ventre. Il a la tête baissé et me maintiens par le ventre. J’ai un bras prit dans son étreinte, mais l’autre libre, et je lui assène un violent coup dans la pomme d’Adam avec ce dernier, le faisant reculer et me lâcher. Mes pieds retouchent le sol. Il tente de m’asséner un coup de poing en guise de représailles, que j’esquive d’un pas de côté, avant de réussir à pivoter derrière lui et le prendre au niveau de la gorge. Il recule un peu, vacille, et tombe à la renverse. Je réalise seulement ma faute : me voilà piégée sous les 86 kg de ce colosse.
Mon opposant fait exprès de faire basculer son poids dans le haut de son corps et me met des coups avec sa tête. D’un geste lent, il se relève. Je reste au sol et, lorsque je tente de me lever, je le vois, pointer son coude vers moi et se laisser tomber. J’effectue une courte roulade sur le coté, et, lui saute au cou. Je lui place mon avant-bras sur la gorge et appuie de toutes mes forces. Il vire rapidement au bleu, et, bien qu’il n’abandonne pas, l’institutrice ordonne d’arrêter le combat immédiatement, déçue par l’échéance de ce combat.
L’adrénaline retombe lentement. Je sens la sueur couler sur ma peau, et mon pouls revenir lentement, très lentement à la normale, et mes idées en faire de même. C’est alors que je réalise, en revenant à ma lucidité, que l’institutrice prenait de gros risques en nous entrainant. C’est illégal, et, la Bastide pourrait lui retomber dessus. Peut-être qu’elle ne se résout simplement pas à nous laisser mourir cette année encore. Tous les ans, ce sont ses élèves qui meurent, nous sommes le plus pauvre département du district, et de loin le moins utile au combat.
J’observe l’institutrice, dont les yeux larmoyants montrent sa crainte, qui nous ordonne de rentrer chez nous. Cette matinée est bien étrange. S’est-elle rendu compte de la connerie qu’elle venait de faire ? Sait-elle qu’elle risque d’être incarcérée à vie ? Je me change brièvement, en enlevant mes habits moulants, pour me vêtir d’un petit ensemble vert, dont les froissements montrent l’absence de fers à repasser, et me dirige vers le portic.
Des membres de la garde royale descendent, fiers de leur allure, vers l’école, me frolant lors du passage de la grille métallique. Je tressaille et grimace en sentant l’odeur putride de sang qui accompagne leurs battes, fièrement accrochées à leurs ceintures. Je me retourne et les regarde rentrer dans le bâtiment. Je ne suis pas sotte, je sais bien ce qu’ils font : ils vont punir notre professeur. Je ne sais quel affreux traitement ils lui réservent, mais pour la première fois de ma vie je prie, je prie pour qu’elle ne meure pas. Ce n’est pas une vilaine fille.
J’avance le regard vite, repensant à cette femme. Elle va probablement mourir et cela pour tenter de nous maintenir en vie, pour une fois. C’est injuste. Tout est injuste ici, et on le remarque simplement en observant de l’autre coté des clôtures métalliques qui entourent notre département. Au delà, on voit la richesse des autres départements, et nous palissons à l’idée que nous n’avons rien.
J’arrive chez moi, et ma mère semble intriguée par le fait que je rentre si tôt. Je n’ai pas besoin de m’expliquer, on entend les cris de l’institutrice par la fenêtre, emmenée de force par ces brutes. Je reste figée en observant ce triste spectacle. Lorsqu’elle refuse d’avancer, un violent coup de batte la frappe dans les mollets. Je ne suis pas fan de ces méthodes, que je juge réellement déplaisante pour l’image de la personne. Ils la font marcher ainsi dans tout le département, afin qu’elle soit couverte de honte. Elle sera probablement battue à mort.
C’en est assez. Je me réveille de mon étrange transe, et dans un cri de haine je monte à ma chambre. J’enlève ma tenue bleue, et la troque contre un manteau en cuir, et ce qui semblerait être un jean - dont l’allure montre qu’il a bien des années derrière lui - avant de prendre de grosses rangers, et de ressortir à vive allure.
Ma mère n’aime pas que je parte chasser et pêcher. Elle dit que c’est risquer. Evidemment, ça l’est, mais je n’ai guère d’autres choix. Nous contenter de manger quelques racines, et un peu de pain sec est impensable, ou du moins, m’est impensable. En sortant, je remarque qu’une petite foule suit la garde royale en criant. Je ne sais pas s’ils protestent, ou se moquent de l’institutrice, pour recevoir un petit peu de pain, ou quelques faveurs de la garde. Je ne cherche pas à comprendre, et me dirige dans la direction inverse.
Je passe devant l’immense clôture, censée être électrifiée, bien qu’elle ne l’est pas, du moins, pas de ce côté : nous sommes dans une région où il arrive que l’eau des fleuves alentours remonte, et cause des crues. Beaucoup de gens sont morts électrocutés à cause de l’électrification des clôtures lors d’inondations. Je passe tout de même dessous, par simple précaution, et me dirige dans la forêt à pas de loup.
Une fois à la lisière de la forêt, je jète un regard derrière moi pour m’assurer de ne pas avoir été suivie, avant de plonger entre les arbres. Lorsque je suis dans la forêt tous mes sens sont aux aguets. Je fais attention au moindre bruit, au moindre craquement de branche, au moindre chant d’un oiseau.
Quelques minutes plus tard, je me retrouve devant ma planque. Un petit trou, couvert de feuilles. J’y plonge le bras pour en ressortir un magnifique arc de bois, ainsi qu’un carquois. Je récupère aussi une canne à pèche, que je place dans mon carquois. Je me baisse, et, avance délicatement. Un petit ruisseau traverse la forêt, et la fend en deux.
Ma main se place sur ma canne à pêche, jusqu’à ce que je sois interpellée par autre chose : un magnifique daim. Il avançait lentement sur l’autre rive. Je dévie donc ma main pour se saisir fermement une flèche. En m’efforçant de ne faire aucun bruit, je prépare ma flèche, tends la corde, jusqu’à ce qu’elle soit contre mes lèvres. Les yeux pétillants à l’idée d’avoir quelque chose de bon à manger ce soir, je lâche la corde, et la flèche pénètre l’animal en pleine tête.
Je suis fière de ma prise. Je ne sais pas si je dois l’être, si je ne suis pas en train de m’emporter, mais, je suis certaine que ce soir, nous mangerons de façon décente ce soir, et c’est le principal. Je m’approche du daim, se mouvant encore, avant de lui asséner un énorme coup à l’aide de mon couteau.
Un problème se pose à moi, et un problème très compliqué à résoudre : comment déplacer l’animal ? Si je le déplace directement, je risque d’être aperçue, et je serais sûrement exécutée net, mais découper l’animal attirerait probablement les prédateurs, qui viendraient me dévorer, moi et mon daim. Je décide d’attendre, avec le daim, jusqu’à la nuit, où normalement la sécurité serait amenuie.
La nuit commence à pointer le bout de son nez, et, je commence à m’assoupir, lorsqu’un bruit m’interpelle : on vient de me dérober mon daim. Le loup commence à reculer, maintenant le daim par la gorge. Dans une incompréhension certaine, je saisis mon arc, et tire une flèche. Je m’étonne moi même : l’animal est touché droit à la gorge, et tombe raide mort, après une légère agonie.
Je saisis l’animal sur le dos malgré sa lourdeur, et me déplace vers le grillage. Ce soir, nous mangerons correctement. C’est formidable.
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Sujet: elea blackwood 
Dim 15 Déc - 22:45
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(KEUPAIN DE COULEEEEEEEEEEUR. 
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